Article - Le Festival de Paro
Pendant 4 jours seront réalisées des danses rituelles (cham) suivies du déploiement, à l’aube, d’une immense image religieuse en tissu mais fragile (Thangdrol) représentant le Guru Rinpoche, le grand maitre qui apporta le bouddhisme au VIII è siècle.
C’est aussi l’occasion pour les moines et la population de faire leurs offrandes.
Dans ce pays de montagne profondément religieux, existe un mélange unique mêlant les enseignements de Bouddha aux vieilles traditions chamaniques.
Ces fêtes présentes toute l’année dans le pays (selon les régions) mobilisent les populations locales et traduisent le profond attachement de ce peuple à ses racines.
Le festival de Paro est la plus remarquable de ces fêtes. Elle fournit l’occasion d’admirer les danses traditionnelles et les étranges cérémonies tantriques pour tenter de percer les secrets d’une mythologie et de rituels foisonnants…
Le festival commémore l’introduction du bouddhisme et ses grandes actions par Padmasambhava ( appelé aussi Guru Rinpoche). La tradition raconte que chaque 10ème jour du calendrier lunaire on doit commémorer un événement spécial dans la vie de Padmasambhava essentiellement dans un festival religieux d’où l’existence de cette fête.
La plupart des festivals durent de trois à cinq jours – dont un jour tombe habituellement le 10ème jour du calendrier lunaire (entre mars et avril). On appelle ce festival Tsechu (Tse signifiant la « date » et « Chu » le chiffre 10 pour le 10 ème jour)
. Les cérémonies du premier jour se déroulent dans le Paro Dzong. Ensuite l’action se déplace à l’extérieur sur une esplanade prévue à cet effet.
Tous les habitants de la vallée, revêtus de leurs plus beaux habits et bijoux, se rendent au Dzong de Paro afin de voir les moines qui, le visage revêtu de masques de singes, d’oiseaux ou de divinités grimaçantes, exécutent des danses qui sont aussi exorcismes, incantations et méditation, au son des tambours qui éloignent les démons.
Les danses ont pour but, en effet, d’honorer le » Guru » en bénissant les spectateurs tout en leur enseignant le dharma bouddhiste afin de les protéger contre le malheur. Les danseurs prennent l’apparence des déités, des héros, des démons, et des animaux courroucés ou compatissants. Zhabdrung, Ngawang, Namgyal et Pema Lingpa étant les principaux chorégraphes de ces danses.
Lors de ce festival, la population assiste à des reconstitutions de légendes et de l’histoire du bouddhisme dans le royaume du Bhoutan.
La danse comprend une partie lente et contemplative qui représente les dieux paisibles et une partie rapide et athlétique où les danseurs incarnent les dieux courroucés. Ces danses sont accompagnées d’instruments de musique (Cymbales, trompettes, tambours dont le nga chen tambour frappé avec un bâton courbé et le lag nga petit tambour tenu à la main)
. À l’origine, événement local centré sur une communauté particulière, la danse est devenue une forme d’art, symbole de l’identité de la nation bhoutanaise. Malheureusement le nombre de danseurs diminue faute de temps pour répéter et de système de formation (Chaque geste codé rend l’apprentissage complexe) mais aussi à cause du désintérêt croissant des jeunes pour cet art.
Entre les danses de masque, un groupe de femmes (avec parfois des hommes) exécute des danses bhoutanaises traditionnelles de manière à mêler le religieux et le laïc.
L’évènement marquant du festival étant le déploiement, comme nous l’avons vu, des Thongdrol (réunissant plusieurs Thangka, toiles religieuses brodées à la main) à partir de très haut immeubles. La plus grande et la plus belle est déployée du haut de la tour centrale du Dzong (L’Utsé) tandis que la seconde est descendue depuis le bâtiment surplombant l’espace de danse donc à l’extérieur du Dzong.
Selon les croyances locales le simple fait de regarder ces immenses toiles fait disparaitre les mauvais karmas. Etre présent au Tsechu est aussi pour un bouddhiste la garantie d’acquérir des mérites.
Les festivals servent à réunir la population mais sont donc aussi l’occasion de renouveler sa foi, de recevoir des bénédictions en observant les danses sacrées, ou bien d'être béni directement par un lama ou un moine bouddhiste présents lors du rituel matinal.
Toutefois, indépendamment de ses implications religieuses, le Tshechu est également une réunion sociale annuelle où les gens organisent des pique-niques en famille ou entre amis. Ces pique-niques sont souvent aussi arrosés d’alcool local !

Philippe Ladouce